Les rémunérations techniques des associés de SEL doivent, en principe, être imposées à l’impôt sur le revenu dans la catégorie des bénéfices non commerciaux, et non plus dans celle des traitements et salaires. Cependant, cette dernière catégorie continue de s’appliquer dans certains cas. Nous faisons le point.
À nouvelle année, nouveau statut fiscal pour les associés de sociétés d’exercice libéral (SEL). À compter de l’imposition des revenus de 2024, les rémunérations des associés de SELAFA, SELAS, SELARL et SELCA (*), perçues au titre de leur activité libérale, doivent être imposées à l’impôt sur le revenu, en principe, dans la catégorie des BNC (bénéfices non commerciaux). Peu importe que ces associés soient dirigeants ou non de leur structure. Le critère est l’absence d’un contrat de travail ou d’un lien de subordination entre l’associé et la société.
Avant 2024, ces rémunérations techniques étaient imposées à l’IR dans la catégorie des traitements et salaires ou, pour ce qui concerne les gérants majoritaires de SELARL et les gérants de SELCA, dans les conditions prévues à l’article 62 du code général des impôts, dès lors que ces SEL étaient assujetties à l’impôt sur les sociétés en raison de leur forme. Ce changement de doctrine de l’administration fiscale s’aligne sur la jurisprudence constante du Conseil d’Etat. Après une année 2023 de transition, ces nouvelles règles sont pleinement obligatoires et effectives à compter de 2024.
Distinction entre activités libérale et de gérance dans les SELARL et SELCA
L’administration a récemment commenté les conséquences de ce changement de régime fiscal en précisant quelles rémunérations entraient dans l’une ou l’autre catégorie d’imposition (BNC ou traitements et salaires/article 62 du CGI).
Concernant le cas spécifique des gérants majoritaires de SELARL et des gérants de SELCA, il convient de distinguer les rémunérations perçues au titre de l’activité libérale (qui sont imposées en tant que BNC) de celles perçues au titre de la fonction de gérant (qui relèvent de l’article 62 du CGI). Le Bofip fournit des exemples (voir le tableau ci-dessous).
Lorsque les fonctions liées à l’exercice libéral et à la gérance sont indissociables dans ces structures, les rémunérations sont imposées dans les conditions prévues par l’article 62 du CGI (voir le tableau ci-dessous). Pour ce faire, le contribuable doit apporter la preuve par tout moyen qu’il est dans l’impossibilité de procéder à une telle distinction. « L’absence de documents statutaires ou comptables tels que ceux fixant la rémunération accordée par la société au titre des fonctions de gérant ou mesurant le temps passé à l’exercice de ces fonctions ne peut pas à elle seule caractériser une impossibilité de distinguer les deux types rémunérations », prévient l’administration.
En pratique, il est admis qu’une part de 5 % de la rémunération d’ensemble perçue par les gérants majoritaires de SELARL et les gérants de SELCA correspond aux revenus afférents à leurs fonctions de gérant. Et ce, qu’il soit possible ou non de les distinguer de la rémunération technique (au titre de l’activité libérale).
Quid des honoraires rétrocédés aux associés de SPFPL ?
Autre précision : les mêmes principes s’appliquent lorsqu’une SEL verse directement une rémunération aux associés d’une SPFPL (société de participations financières de professions libérales) au titre de leur activité professionnelle au sein de cette SEL. Cette rémunération relève en principe de la catégorie des BNC.
Voici un récapitulatif des différents régimes d’imposition possibles :
Catégorie de personnes imposées | Rémunérations relevant de la catégorie des BNC (article 92 du CGI) | Rémunérations relevant de la catégorie des traitements et salaires |
Associés de SEL (règle générale) | ► Rémunérations perçues au titre de l’activité libérale dès lors qu’il n’existe aucun contrat de travail ou aucun lien de subordination entre l’associé et la société | ► Rémunérations perçues au titre d’une activité libérale exercée dans des conditions traduisant l’existence d’un lien de subordination entre l’associé et la société |
Associés de SPFPL | ► Rémunérations versées directement par une SEL au titre de leur « activité professionnelle » au sein de la SEL | x |
Catégorie de personnes imposées | Rémunérations relevant de la catégorie des BNC (article 92 du CGI) | Rémunérations relevant de l’article 62 du CGI |
Gérants majoritaires de SELARL et gérants de SELCA | ► Rémunérations perçues au titre de l’activité libérale, y compris les tâches de nature administrative qui sont inhérentes à la pratique de l’activité libérale :
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► Rémunérations perçues au titre de l’activité de gérance. Il s’agit des tâches qui ne sont pas réalisées dans le cadre de l’activité libérale :
► Rémunérations dont il est impossible de dire si elles sont perçues au titre de l’exercice libéral ou au titre des fonctions de gérant (à justifier) ♦ Il est admis que 5 % de la rémunération d’ensemble corresponde aux revenus perçus au titre de l’activité de gérance |
Bénéfice du régime micro-BNC
Plus globalement, dès lors que leurs rémunérations techniques sont imposées dans la catégorie des BNC, les associés de SEL peuvent bénéficier du régime micro-BNC, indique le rescrit du 16 novembre 2023 (intégré au Bofip). Condition : respecter le seuil de droit commun prévu par ce régime, à savoir ne pas excéder 77 700 euros de chiffre d’affaires hors taxe lors de l’année civile précédente ou de la pénultième année.
Pour l’appréciation du seuil d’application du régime micro-BNC, il faut retenir :
- la rémunération versée par la SEL ;
- le cas échéant, « les dépenses professionnelles de l’associé acquittées en son nom et pour son compte par la SEL, au titre de l’année civile précédente et/ou de la pénultième année, qui auraient été déclarées dans la catégorie des BNC si elles avaient été perçues à compter de 2024 ».
Les associés relevant du régime micro-BNC doivent porter le montant de leurs recettes annuelles directement sur la déclaration n° 2042, précise l’administration. Pour les personnes relevant du régime de la déclaration contrôlée, la déclaration du résultat annuel se fait sur le formulaire n° 2035-SD.
TVA et CFE
Qu’en est-il de la soumission à la TVA des rémunérations techniques perçues par les associés de SEL ?
Elles n’entrent pas dans le champ d’application de la TVA, indique le rescrit du 18 novembre. C’est bien la société d’exercice libéral qui exerce la profession constituant son objet social par l’intermédiaire des associés ; l’associé ne supporte pas « le risque économique propre à cette activité », explique l’administration. Ainsi, ce dernier ne peut pas être regardé comme étant assujetti à la TVA. Par conséquent, les rémunérations ne sont pas soumises à l’obligation de facturation.
En matière de CFE (cotisation foncière des entreprises), les sociétés d’exercice libéral sont assujetties personnellement à la CFE dans les conditions de droit commun, dans la mesure où elles constituent des sociétés commerciales par leur forme et qui exercent une activité libérale. En ce qui concerne les associés de SEL, il convient de distinguer selon que l’associé exerce ou non une « activité professionnelle » propre : en cas d’exercice d’une activité professionnelle propre non salariée, l’associé devient redevable de la CFE au titre de cette activité. L’existence d’une telle activité peut être « établie par un faisceau d’indices attestant une absence de lien de subordination avec la SEL, l’existence de moyens propres, ou encore l’existence d’une clientèle ou patientèle distincte ». L’exercice, par un associé, d’une activité professionnelle propre donne donc lieu à une imposition distincte, est-il précisé. À défaut « un changement de catégorie d’imposition n’emporte pas la création d’une nouvelle personne juridique ou d’une nouvelle activité économique ». Donc seule la SEL demeure assujettie à la CFE.
(*) Les SEL peuvent revêtir la forme de sociétés à responsabilité limitée (SELARL), de sociétés anonymes (SELAFA), de sociétés en commandite par actions (SELCA) ou de sociétés par actions simplifiées (SELAS).